Quand on parle de la Bolivie, l’on pense à ce gigantesque désert de sel qu’est le Salar d’Uyuni, étape inévitable du rallye Dakar, au lac Titicaca, le plus haut lac au monde, haut lieu de la religion inca, à son Président Evo Moralès chiquant de la feuille de coca à l’ONU, mais probablement pas à Ignace de Loyola et sa Compagnie de Jésus. Et pourtant, pourtant il reste dans l’Est de la Bolivie, à proximité de la frontière brésilienne, moins d’une dizaine de missions (missiones ou reducciones en espagnol) inscrites aujourd’hui au Patrimoine mondial de l’Humanité de l’UNESCO.
Des missions jésuites témoins majeurs de l’histoire de la Bolivie
Ces missions se visitent facilement par de bonnes routes asphaltées ou quelques pistes en excellent état en partant de Santa Cruz de la Sierra, la plus grande ville de Bolivie. Elles sont un parfait témoignage de ce que fut cette extraordinaire utopie des missionnaires jésuites venus protéger les indiens des comportements extraordinairement violents des colons espagnols et portugais. Ils construisirent avec les indiens chiquitos un modèle de civilisation où l’argent n’existait pas, où les prémisses de la démocratie étaient inscrites en filigrane et où ils surent faire éclater leurs qualités artistiques, musicales ou agricoles.
Photo : Francois L.
San Francisco Javier, Concepción, San Ignacio, San Miguel, San Rafael, Santa Ana et San José, ce sont celles qui vous attendent.
Des missions jésuites à l’aménagement et l’architecture emplis de sérénité
Ces missions sont toutes en bordure d’une vaste place centrale avec un parc ombragé dans de coquettes petites villes de quelques milliers d’habitants. L’église est bien sûr là avec son clocher et ses cloches, entourée de très grands cloitres avec une pelouse en leur centre, tout 300 ans plus tard en si bel état. Une sérénité, une quiétude de l’âme vous emplissent et vous commencez à comprendre ces 160 ans de cette aventure jésuite (environ de 1600 à 1760).
Les petits musées vous présentent sculptures religieuses en bois de l’époque, meubles véritables œuvres de marqueterie et les ateliers de lutherie avec harpes, violons, violoncelles et même orgues en bois.
Photo : Francois L.
L’architecture des églises est dite baroque métissée, baroque car il suffit d’admirer retables, chaires, confessionnaux et autres lustres tous d’une exécution très raffinée, métissée car les indiens chiquitos sont souvent représentés sans oublier fleurs ou animaux. Peintures or et argent brillent de mille feux, mais elles ne sont ni d’or ni d’argent, mais de mica. Dire que cela a été inventé il y a plus de 300 ans…. Les tuiles en argile des toits ont été moulées à même les cuisses des artisans…
On ne peut qu’être émerveillé par toutes ces beautés.
Des missions jésuites dont la visite sont des moments d’émotion
A San Miguel, gros village de quelques milliers d’âme, nous avons croisé un adolescent avec son violon à la main ! Un festival de musique missionnaire et de théâtre est organisé chaque fin août à San José.
Photo : Francois L.
A San Francisco Javier, nous avons pu discuter avec deux prêtres polonais, plus tout jeunes, qui étaient si heureux de pouvoir parler français. Nous nous souvenons aussi avec émotion du si touchant bedeau de Santa Ana, la plus petite des missions jésuites, qui fut terminée par les indiens chiquitos malgré l’expulsion en 1764 des jésuites.
Photo : Francois L.
Lorsqu’il apprit que nous étions français, il nous fit de suite une démonstration d’une viole un peu grinçante tout en chantant un cantique (nous avons vite compris qu’il n’était pas Placido Domingo), puis il nous mena à un orgue vieux de plusieurs siècles, à un seul clavier, qui a été restaurée en l’an 2000 par des français : entre autres, les vieux tuyaux en bois d’origine ont été remplacés par des tubes métalliques.
Des missions jésuites qui sont autant de possibilité de découvrir les rêves et utopies des jésuites
Les jésuites avaient obtenu du pape et de l’empereur Charles Quint qu’un état autonome soit créé entre les fleuves Parana et Paraguay. Qui plus est, seuls des jésuites avaient le droit d’y pénétrer ! Ils purent ainsi y développer un modèle de société où l’argent n’existait pas : tout était affaire de troc, où les décisions concernant chaque mission étaient prises par un conseil qui regroupait les caciques et leurs deux jésuites, où le catholicisme était mâtiné de pratiques animistes, où les amérindiens étaient respectés et protégés…. Cette expérience si loin des pratiques de l’époque ne pouvait pas résister aux convoitises des colons espagnols et portugais et disparut avec la dissolution en 1773 de la Compagnie de Jésus par le pape Clément XIV. Mais les indiens chiquitos n’ont pas oublié cette période idyllique : ils ont inauguré en 1991 une plaque en hommage aux pères jésuites.
Au-delà de cette plaque, leur ombre a continué de planer sur les missions jésuites de Bolivie : ce sont celles qui ont le mieux résisté au temps. Elles vous offrent un voyage vers une utopie perdue.
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Par François L. (textes et photos)
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