La Terre de Feu ou Tierra del Fuego est la plus jeune des provinces argentines. Elle fut habitée pendant environ 10 000 ans par plusieurs groupes aborigènes : les selknams ou onas, les yámanas ou yaganes, les alacalufes ou kawaskhar, le haush ou manneken, les Tehuelches. Lorsque l’on part en voyage en Patagonie et en Terre de Feu, on ne découvre pas seulement les splendides paysages : glaciers, montagnes, forêts…que Fernando Magellan a découvert lors de son passage en 1520. On découvre également une histoire à travers la présence de ses nombreuses ethnies, les premiers peuples de la Terre de Feu.
Photo : Cruceros Skorpios
1- Les Selknams (ou Onas)
Les Selk’nam connus également sous le nom de Onas, ont donné son nom original à l’île de la Terre de Feu « Karukinka ». Ils vécurent dans le nord de l’île dominée par l’immense pampa et dans les forêts du sud de l’île au climat inhospitalier avec des étés courts et des hivers longs, humides et froids. La faune était très abondante avec des mammifères marins (otaries, baleines), des mollusques, des renards, des rongeurs et des guanacos. Les Selk’nam étaient des chasseurs-cueilleurs nomades ce qui leur permettait d’exploiter les ressources dispersées sur toute l’île, notamment le guanaco, chassé avec des arcs et des flèches, mais aussi des boleadoras ou bolas, des armes de jet sous forme de boules. Cette activité était plutôt réservée aux hommes mais les femmes chassaient et pêchaient également en plus de cuisiner, fabriquer les paniers, s’occuper des enfants, ramasser le bois. Pendant ce temps, les hommes fabriquaient les différents outils qui leur permettaient de ramener la nourriture dans le foyer. Leur seul animal domestique était le chien, indispensable pour la chasse au guanaco et au renard.
La première rencontre Selk’nam/Europe eû lieu en 1580 avec l’expédition de Pedro Sarmiento de Gamboa, mais elle ne devint habituelle qu’après 1880, lorsque l’occupation européenne de la Terre de Feu commença par l’exploitation de l’or puis ensuite l’exploitation des paturages pour l’élevage des moutons.
En 1883, le gouvernement a accordé la première concession dans la partie nord de l’île pour l’élevage de moutons ce qui a eu pour conséquence la chasse massive des premiers moutons. Le missionnaire anglican Thomas Bridges exhorte les indigènes à respecter la propriété des colons. Au cours de ce même siècle, l’ordre salésien a fondé des missions sur l’Ile Dawson (1889) et dans la future ville de Rio Grande (1896). Cette politique de concentration dans les missions à créé une situation favorable à la propagation des maladies infectieuses, ce qui a entrainé la mort des réfugiés autochtones en raison de la tuberculose, de la grippe, de la pneumonie, de la scarlatine et des maladies vénériennes. La dernière période de l’histoire des Selk’nam se situe entre 1880 et 1905. Sous Pinochet, l’Ile Dawson est devenue une prison pour les prisonniers politiques. Le Chili a reconnu le génocide des Selk’nam en 2003.
2- Les Yamanas (ou Yaganes)
Les Yamanas étaient des nomades qui ne passaient que quelques semaines au même endroit. De taille moyenne (1.58 m env.), ils sont connus comme étant les canoéistes du Canal de Beagle. Ils vivaient le long des côtes de la Terre de Feu ainsi que les côtes environnantes du Cap Horn. Ils vivaient principalement de phoques pour sa teneur élevée en matières grasses, mais ils se nourrissaient également de guanacos, d’otaries, d’oiseaux et de poissons. Pour chasser, leur principale arme était le harpon, ils avaient très peu d’arcs et de flèches.
Ils naviguaient sur de courtes distances, à bord de petites embarcations de tiges de bois recouvertes de plaques d’écorce, dans lesquelles l’eau pénétrait en abondance. Au centre de la pirogue, brulait le feu. La femme, assise à l’arrière dirigeait le bateau tandis que l’homme capturait les lions de mer et les loutres. Les femmes capturaient les poissons et ramassaient les crustacés et les crabes.
L’une de leurs activité était la vannerie. Ils fabriquaient des paniers de roseaux tissés, utilisant des poinçons faits d’os d’oiseaux acérés. Ils fabriquaient également des sacs en cuir et en peau ainsi que des seaux en écorce. Pour extraire l’écorce, les hommes utilisaient de longs leviers biseautés en os de baleines.
La nuit, les yamanas dormaient sous abri. Leurs habitations étaient faites de huttes de troncs et de branches de forme conique.
En 1884, l’anglais Thomas Bridges, missionnaire anglican, a procédé à un recensement de la population des Yámana, il y en avait environ 1000 que l’on pouvait trouver de la Péninsule de Brecknock jusqu’à la baie de Slogett puis du Canal de Beagle jusqu’au Cap Horn. Leurs déplacements ont eu lieu en petits groupes, de deux à trois familles.
Comme d’autres peuples, les yamanas entrèrent en contact avec les européens ce qui va entrainer petit à petit leur disparition. Les yamanas vont être progressivement attaqués par des maladies comme la tuberculose, la rougeole et la syphilis. De 1000 personnes en 1884, l’année suivante, la moitié disparut, et en 1924, on dénombrait moins de 50 personnes. La dernière représentante yamana a disparu récemment.
Lors de la croisière Australis, vous aurez l’occasion de vous arrêter dans la Baie Wulaïa où vous pourrez visiter un petit musée dédiée aux Yamanas.
A Ushuaïa, je vous conseille la visite de la galerie thématique sur les peuples de la Terre de Feu, un lieu très intéressant pour en découvrir un peu plus sur l’histoire de la région.
3- Les Kawesqar (ou Alacalufes)
Kawesqar, signifierait « hommes de peau et d’os ». Le peuple Kawashkar vivait le long des côtes entre le Golfe de Penas et le Canal de Cockburn dans la partie ouest de la Terre de Feu, région pluvieuse avec une végétation dense où les conditions sont rudes. Les îles étaient pratiquement inaccessibles en raison de leur absence de plages et de la densité de la forêt magellanique. Les chenaux, d’environ 480 kilomètres de long, sont presque toutes des eaux calmes et naviguables. Le climat y est pluvieux et il n’y a que deux saisons : l’hiver, où le thermomètre varie entre 0º et -5º C et l’été, avec des températures ne dépassant pas 10º C. Les kawaskhar étaient un groupe de nomades, chasseurs-cueilleurs, ils naviguaient à bord d’embarcations fabriquées en écorce d’arbres (coigüe) cousu avec les nerfs de baleines les uns aux autres.
Photo : Cruceros Skorpios
Le régime alimentaire de ce peuple était principalement carnivore et gras. Les femmes plongeaient pour récupérer des fruits de mer mais les kaweskhar se nourrissait principalement de phoques, loutres de mer, d’otaries, d’oiseaux, de fruits de mer, et de poissons. Ils portaient des vêtements faits de peau de phoques ou de loutres de mer et recouvraient leur peau de graisse animale. Ils construisirent leurs canons avec des écorces d’arbre attachées avec des fibres végétales. Le tout était calfeutré avec une mixture de saleté, graisse et racines. Pour se réchauffer, ils mettaient de la terre dans le canot et allumèrent des feux de joie à l’intérieur. Les hommes fabriquaient les différents outils et par exemple, pour la chasse à l’otarie, ils utilisaient un harpon d’os ou un grand filet fait de tendons ou de fils de cuir afin d’attraper l’animal vivant. Sa chair et celle de la baleine ont été ingérées dans un état avancé de putréfaction. Il y a peu d’informations sur l’utilisation de l’arc et de la flèche. Le chien était fondamental dans la chasse au huemul et, plus tard et éventuellement, dans le bétail de cimarron. Les quelques légumes qu’ils consommaient, ainsi que les champignons et les œufs d’oiseaux, étaient récoltés sur la terre ferme. Au milieu du 20ème siècle, les kawesqar avaient besoin d’un interprete lorsqu’on leur parlait en espagnol. 30 ans plus tard, l’espagnol leur était imposé. En 1925, la population est tombée à 150. En 1940, ce groupe a bénéficié de la loi sur la protection des kawesqar qui a entraîné leur installation sur l’île Wellington, à Puerto Eden. La population kawesqar a continué à décliner. Puis, les conditions de vie précaires à Puerto Eden ont favorisé une migration importante en 1995 vers Punta Arenas et vers Puerto Natales.
Pour en apprendre un peu plus sur ce peuple, vous pouvez prendre part à cette croisière à bord des navires Skorpios, où le temps de quelques jours, vous longerez la côte où les kawesqars vécurent.
4- Les Haush (ou Manneken)
Les Haush vivaient dans la partie orientale de la Grande Île de la Terre de Feu, entre la Baie de Buen Suceso et le Cap San Pablo. Ils étaient des nomades et utilisèrent des flèches et des arcs pour chasser le guanaco. Ils utilisèrent le harpon et la lance pour pêcher. Ils attrapaient également des mollusques.
Ils n’avaient pas de cannes et vivaient dans des cabanes fabriqués avec des branches d’arbres parfois couvertes par des peaux d’animaux. Ce fut l’un des premiers peuples indigènes à disparaitre après l’arrivée des conquistadors espagnols et des colons.
5- Les Tehuelches (ou Aonikenk)
Les Tehuelches vivaient dans la steppe Patagone, entre la rivière Negro et le détroit de Magellan. Ils ont été appelés « Patagons » par les navigateurs européens. Bien qu’ils partageaient un mode de vie général et une langue, il existait plusieurs dialectes et, comme à l’époque historique, les groupes de la région de Magellan sont connus sous le nom de « aonikenk ». Ces tribus chassèrent le nandou et le guanaco. Ils utilisaient la viande pour se nourrir et la peau leur servait de vêtements et pour construire des habitations. Toute la communauté participait à la chasse avec des bolas, des flèches et des arcs. A partir du 18ème siècle, ils commencèrent à utiliser des chevaux qui furent introduits par les espagnols augmentant de manière significative les distances parcourues et en multipliant les contacts avec les populations voisines.
A la fin du 19ème siècle, des moutons ont été introduits pour la première fois en Patagonie. Les Tehuelches ont opté pour l’élevage et le commerce de chevaux, l’élevage de moutons et / ou de bovins ou les salariés dans les estancias voisines, accélérant ainsi leur entrée dans le système de production occidental. Bien que les autorités de l’époque se soient inquiétées, l’introduction entre autres de nouvelles maladies et de l’alcool a décimé ce groupe. Les derniers Tehuelches se sont installés dans les réserves de Camusu Aike et de Lago Cardiel, dans l’actuelle Argentine, et dans ce pays, plusieurs communautés autochtones revendiquent cet héritage.
Dorénavant, ces peuples ont disparu mais ont marqué l’histoire du Chili et de l’Argentine. N’hésitez pas à nous contacter si vous souhaitez découvrir à travers un voyage leur histoire. Un voyage en Patagonie et en Terre de Feu, ce n’est pas seulement, un voyage contemplatif c’est également, un voyage culturel.
Pour en savoir plus visitez le site du Museo Chileno de Arte Precolombino.
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